Il y a un plaisir coupable à se faire peur et à envisager des versions de nous-mêmes plus ténébreuses. Le mal et l’ésotérisme fascine depuis toujours.
Les livres de Lovecraft, Poe et King. Les films de la 9ème Porte, à Constantine en passant par Hellraiser… tous jouent sur une sensation troublante qu’un monde sombre existe en parallèle du notre, caché, et que des forces se livrent des guerres secrètes. Quand au “grand secret” au cœur de toutes ces œuvres, elle conduit toujours à la folie ou la mort.
Hé bien, c’est très exactement ce genre d’ambiance “suintante” que se propose de recréer le jeu Cultist.
D’apparence modeste, ce jeu, qui tire entre le livre dont vous êtes le héros et le jeu de cartes solitaire cache en fait une perle angoissante.
Perdu dans la vie d’un(e) autre
Dès le départ le jeu déconcerte : une table, une carte “petit boulot”, une stèle “Travail”, que faire ? L’esprit malade créateur du jeu l’a voulu ainsi. Pas de règles évidentes, pas de script qui prend par la main. Une gêne voulue, dès le départ, face au jeu.
Je joue en anglais par choix, mais sur Steam, des fans on fait la version française (juste des fichiers à remplacer dans un répertoire) – voir les liens en bas d’article.
Très vite, on bouge la carte, on prend le temps de lire le court texte. Apparemment, je suis un simple préposé dans un hôpital. La carte s’enfiche dans la stèle “Travail”, une action se déclenche avec un sablier… me voici donc à passer une journée au travail, manifestement malheureux et sans avenir.
Le sablier m’indique les heures qui passent – à la fin de la journée, deux nouvelles cartes en plus ! Un peu d’argent, un peu de santé. Et sur une nouvelle stèle la possibilité de rêver.
Très vite on comprend, les stèles permettent d’activer les cartes et de les combiner, les variations semblent alors infinies.
Au fil du jeu, un rêve mène à une boutique, la boutique à des personnages, et ainsi de suite jusqu’à nous faire toucher du doigt un des grands secrets.
La puissance de l’ambiance
Cultist, c’est donc avant tout un jeu de cartes, il faut aimer lire. C’est aussi un jeu d’ambiance, il faut vouloir plonger dans la peau du personnage et se sentir glisser doucement vers les ténèbres. C’est enfin un casse-tête, avec des combinaisons de cartes et de stèles à se souvenir pour débloquer des chemins de jeu.
Tout l’arsenal classique du fantastique
Tout l’univers déployé dans le jeu tente un syncrétisme de tous les éléments classiques au genre : la petite boutique qui cache les activités d’une secte, les bibliothèques et les livres anciens et rares, les fous, les alcooliques et les bas-fonds… et le chaos rampant dans la lignée de Cthulhu.
Un jeu extrêmement sadique et frustrant
Structurel au concept du jeu, le fait de devoir tout découvrir par soi-même requiert d’échouer – et d’échouer souvent et longtemps. Certaines mécaniques et aspects ne se révèlent qu’après de longues heures.
Les fins possibles du jeu sont assez réussies, même si le personnage que l’on incarne fini quasi toujours très mal – la folie en particulier rôde tout au long de l’aventure, dans une vraie lignée lovecraftienne.